mardi 12 avril 2011

Face à une Terre imprévisible

Conférence Face à une Terre imprévisible de S.SALORD et M.VILLENEUVE
mardi 12 avril
de 18:30 à 21:30
http://goo.gl/UqCG6

Cette conférence à 2 voix , suivit d'un débat, sera présentée par :

Stéphane SALORD, auteur du roman "Une république de la Nature", qu'il dédicacera à cette occasion,

et Michel VILLENEUVE, directeur de recherche au CNRS, spécialisé en géophysique et mouvements de la Terre.

Le thème choisit, " Face à une Terre imprévisible", illustre l'actualité tragique mais plus encore, une réflexion que mènent les deux conférenciers sur le sort de l'homme dans le monde actuel; dans son roman-fiction, écrit en juillet 2010, Stéphane SALORD place la région Paca et la France face à un immense séisme; il définit une possible reconstruction avec le concours de toute la méditerranée;

Michel VILLENEUVE, scientifique, spécialiste des séismes et des sciences de la Terre, fera le point sur cette question en France comme ailleurs;
la conférence sera suivit d'un verre de l'amitié; veuillez signaler votre présence ;


Interview de Stéphane SALORD pour le Journal culturel aixois COULISSES

Avec Vincent NGUYEN LAM, directeur de la publication
A propos de son dernier ouvrage : « Une république de la nature »
Paru il y deux mois aux éditions Terra Mare, ce roman retrace les conséquences sociales, politiques et économiques de ce que pourrait être un séisme ravageur dans le sud de la France.
L’auteur y aborde ainsi à la fois des questions d’histoire, de philosophie et de technologie, au travers de la fin de règne d’un chef de l’Etat français bien mal en point mais qui va dans ces circonstances exceptionnelles trouver une nouvelle posture, jusqu’à la tragédie finale…

http://www.editions-terramare.com/republiquedelanature-p-32.html


Interview réalisée le samedi 26 mars 2011 à Aix en Provence

Coulisses : Vous venez de sortir un 4ieme livre intitulé " Une république de la nature", pourquoi un tel titre?

Stéphane SALORD : Je suis parti d'un sentiment certes répandu, selon lequel la nature vivait sa propre vie, finalement indépendamment des humains, et qu'elle n'attendait non seulement rien des humains, qu'elle ne leur devait pas grand chose, mais que les humains, fragiles, étaient posés dessus un peu par hasard...

Ce n'est pas un peu panthéiste comme vision du monde?

Mon livre n'est pas religieux; il est simplement basé sur le doute que l'humanité puisse faire "sans" la nature; pour moi il est claire que les marges de manœuvre humaine se resserrent fortement, que ce soit par leurs erreurs, autant que par une nature maintenant violement imprévisible.

Cela n'a pas toujours été le cas?

Oui, bien sur! Mais notre société a accouché par ses progrès d'un sentiment mensonger de toute puissance que je veux combattre; il ne me semble pas légitime de penser que le progrès de l'homme peut être illimité désormais; il doit par contre, pour continuer son évolution, être "remis à sa place" et arrêter de penser qu'il est le cœur de tout, le centre de l'univers; ses progrès futur seront à la fois collectifs et psychologiques.

Votre ouvrage est un roman, avec un chef de l'Etat français comme personnage central, bien empêtré dans ses problèmes politiques et personnels; pour quoi un tel personnage central, est ce l'actuel chef de l'Etat?

Tous les pouvoirs sont empêtrés dans des situations inextricables! « Mon » chef de l'Etat" est un ancien militaire, énergique, moderne, mais malheureux, triste et seul; et ce malheur devient un abime; il comprend progressivement que le mouvement de l'histoire va appeler un changement profond de sa posture face au pouvoir et la vie elle même. C’est un livre sur le changement, la métamorphose, conditionnés par des événements terribles, qui obligent à un mutation de la société entière.

Justement, vous écrivez ce livre au cœur de l'été 2010, et vous parlez d'un séisme de force 9, et d'un tsunami qui ravagent tout; vous êtes un visionnaire?

Pas du tout! Séismes et tsunamis font partis de la géologie et des temps les plus reculés du monde. J’ai voulu simplement appliquer à ma région provençale un séisme aussi fort que celui d 'Haïti, et montrer par la même que nous n'étions à l'abri de rien! Mais mon livre reste une fiction. J’ai surtout décris le processus de résilience d'un vieux pays pourtant volontaire comme le notre: comment sortir d'une telle épreuve? On a tort de se penser à l'abri de tout... mais l'essentiel pour moi est bien de montrer que l'histoire humaine n'est pas écrite, que tout peu arriver, que la fatalité peu être une force de changement puissante pouvant conditionner la volonté humaine elle même. J’utilise d’ailleurs dans mon ouvrage la question centrale de l’énergie pour illustrer la transition maintenant nécessaire.

Vous vous livrez surtout à un véritable plaidoyer pour la méditerranée, pour l'unité des peuples et des destins; en juillet, cette hypothèse était inenvisageable; aujourd'hui, le mouvement politique de cette région vous donne raison?

Je suis comme beaucoup d'auteurs et d'historiens : je n'ai jamais accepté la fragmentation de nos peuples de méditerranée, les dictatures plus ou moins larvées qui ont condamnée d'aussi belle culture à un état rampant; je m'inspire beaucoup de la sagesse de Fernand Braudel, qui aime comme moi le « temps long »; je veux dans ce livre prouver que notre destin n'est que commun, et pas autrement, la géographie des peuples commande à l'histoire et pas l'inverse. Je suis assez utopiste dans mon approche; mais hélas, je montre dans ce roman que seule une catastrophe peut nous aider à sortir de ce fatalisme de l'ignorance et de l'indifférence.

Et la guerre? Elle marque la fin de votre roman; pourquoi faire ressurgir un tel monstre?

Je ne suis ni pessimiste ni optimiste; je suis réaliste. Les mouvements du monde sont brutaux; la nature impose le rythme, et les hommes créent des systèmes; j'ai le sentiment que nos modes d'actions sont usés et que l'économique a tout digéré; la place du politique est faible; ce sont les intérêts financiers qui commandent et pas l'intérêt général. La guerre est pour moi la conséquence d'une société planétaire qui reste animée de rivalité et de prédation, d'égoïsme et d'injustice. La guerre arrive plus vite qu'on ne le croit, et elle vient quand les solutions sont épuisées. Elle est le syndrome d'une absence d'imaginaire, d'une corruption des élites, d'une impossibilité d'autre chose. La guerre est l'état permanent de l'humanité; elle n'a jamais quitté notre imaginaire le plus sombre.

Jules Verne, Hermann Hesse, Teilhard de Chardin.... on les retrouve dans tous vos travaux; c'est un drôle de mélange; pourquoi eux?

Des esprits purs, ouverts, sans compromissions, aimant la science mais partageant des doutes profonds sur l'esprit humains. Ils ont vu loin! Ce sont des contemporains hors normes, en dehors du temps; j'aime chez eux leur "folie humaniste"; lisez Teilhard, un profond croyant également paléontologue, et des meilleurs, qui cherche les traces de l'évolution humaine et décris la conscience comme moteur du monde; et Jules Verne qui en fin de XIXieme siècle regarde notre époque dans les yeux, prévoit et prévient d'un monde technique aberrant, et qui aime tant la Terre, qui la respecte et la comprend; et Hesse, un allemand post romantique, qui visite le monde intérieur de la souffrance et de l'espoir, invente des société imaginaires synthétisants 3000 ans de philosophie.... Ces hommes sont des hauteurs; à nous de les relire et de les contempler encore et toujours.

Pour terminer, votre roman peut servir à quoi ?

A chacun de voir. Nous avons quitté l'époque des religions imposées et des certitudes; c'est à nous même de lire et de faire l'histoire. Attendons-nous au pire, car même s’il ne vient pas, il doit nous préserver de nos excès et de notre orgueil. Le temps qui vient sera dangereux et tourmenté, c'est maintenant évident. Mais les sociétés humaines sont formidables d'imaginations et de talents. Il est peut être temps de laisser ces talents s'exprimer contre l'esprit de système qui cloisonne et stérilise. Sans cela, pas d'espoir possible.

Stéphane SALORD :